Chapitre 2 : Invitée Inattendue

À cette voix, Trafalgar tressaillit. L'urgence de vider les lieux s'imposa. Ils ne pouvaient point se permettre de s'attarder plus longtemps. Ils devaient se mettre à l'abri !
"Bepo !
- Aye, Capitane !"
Sans un mot de plus, le ténébreux lui lança son nodachi. Puis, il souleva alors de terre le corps inerte et le jeta sur son épaule. Sa conscience lui commandait, malgré tout, de ne pas l'abandonner ici. Pourtant, une petite voix lui soufflait que cette femme lui apporterait bien des ennuis et des tourments. Certain de bientôt le regretter, il emporta son fardeau à l'abri de l'ennemi... Usant du pouvoir de l'ope ope no mi, il se téléporta avec le reste du groupe aussi loin que possible, et à maintes reprises, de leur adversaire. L'essentiel étant de rejoindre le sous-marin avant que l'amiral Kizaru ne parvienne à les rattraper.

L'effervescence d'un départ en catastrophe avait rapidement fait place au calme. Les Hearts profitaient après quelques sueurs froides d'une accalmie. Ils se retrouvèrent comme bien souvent autour d'une bonne bière fraîche au réfectoire.
Il n'y avait pas moment plus appréciable que celui-ci dans leur vie de pirates. Ils conversaient de tout et de rien, plaisantaient même. Sauf que pour une fois, les discussions prenaient une tout autre tournure.
Effectivement, ces dernières tournaient tout autour d'un seul et unique sujet : « l'invitée » du capitaine. Elle intriguait bon nombre d'entre eux. Et à juste titre : Penguin et Shashi n'avaient guère manqué de leur conter leur mésaventure.
"Et c'est quoi ça ? s'enquit Arkan en pointant la table devant Penguin.
Suivant la direction indiquée, les regards s'abaissèrent. Penguin exhala un long soupir. Il considéra l'objet en question pendant plusieurs secondes avant de prendre à deux mains l'un des morceaux de l'épée brisée. Il ne s'expliquait point pourquoi au moment le plus critique, il avait ramassé cette dernière. Elle ne servait plus à rien.
- C'est son sabre. Il s'est cassé lors de l'attaque finale. Kizaru l'a bloquée, et elle s'est rompue en deux.
Louis — un vieil homme d'une cinquantaine d'années les cheveux grisonnant et responsable en chef des mécaniciens— s'empara de la seconde partie. Il en admira la garde, délicate et raffinée. Travaillée à l'or fin, elle demeurait toutefois une simple breloque à présent. Enfin, peut-être qu'en vendant cette partie, ils en tireraient un bon prix, songea-t-il.
- Où est le capitaine ? demanda alors Ren à l'autre bout du réfectoire.
- Certainement dans sa chambre. Il a très peu dormi ces derniers jours, révéla Ban en coulant un regard vers la cafetière fumante et pleine.
- Vous croyez qu'elle restera avec nous ? s'enquit timidement Tim qui s'imaginait déjà devoir gérer une nouvelle personne.
- Impossible, intervint Jean Bart. D'après ce que nous avons pu voir, elle fait partie de l'équipage du chapeau de paille."
Un silence s'ensuivit durant lequel personne ne parla. Chacun se perdit dans ses pensées avec une idée bien précise de la situation actuelle.
Pourtant, après un long moment, Louis invita Shashi à leur conter, une fois de plus, le duel contre Kizaru. Autant dire que l'intéressé ne se fit guère prier. Shashi ne se lassait pas de narrer le combat de leur capitaine aux côtés de la chapeau de paille. Il fallait avouer que la demoiselle lui avait fait une forte impression. Son talent de sabreuse ainsi que son aptitude à anticiper les mouvements de l'amiral le fascinait. Sans compter que, non contente de savoir se battre, elle possédait un charme certain. Belle, des courbes des plus appétissantes, elle se trouvait actuellement à bord. La véritable question demeurait toutefois de découvrir pour combien de temps encore.
"On aurait dit qu'elle savait où il allait apparaître."
Penguin opina du chef. Il ne manqua pas de souligner également sa manière impolie de s'adresser à leur supérieur. Certes, elle ne lui devait aucunement le respect, mais de là à l'insulter... Il ne fallait tout de même pas abuser. Il était même surprenant qu'au lieu de l'achever lui-même, Law ait tenu à la sauver.
Les Hearts écoutaient à la fois, amusés et fascinés, le récit de leurs compagnons. En réalité, ils s'impatientaient de pouvoir questionner leur capitaine à ce propos. Ban, appuyé contre le comptoir de sa cuisine, les bras croisés sur le torse leur prêtait une oreille attentive.
Dans toute cette histoire, il ne retenait qu'une chose : la jeune inconnue était assez forte pour rivaliser avec un amiral de la marine. Et de toute évidence, il n'était pas le seul à le penser, songea-t-il en avisant de l'expression de Louis, le mécanicien en chef.
"En tout cas, je me la taperai bien, fanfaronna Penguin. Ennemie ou pas, elle me plaît bien.
Shashi ricana avant de lui rappeler que toutes les femmes les approchant finissaient dans le lit de leur supérieur. Eux devaient se contenter des rares miettes délaissées à leur intention. À ces mots aussi sincères que douloureux, Penguin s'avachit sur la table, désespéré tandis que ses compagnons éclataient de rire.
- C'est même pas drôle, marmonna Penguin. En plus, je doute qu'elle intéresse le capitaine. Elle est loin d'entrer dans ses critères d'exigence."

Une douleur lui vrilla l'abdomen, la tirant par la même occasion de son paisible sommeil. Soulevant ses paupières, la première chose qu'elle distingua fut une lueur aveuglante au-dessus d'elle qui l'obligea à placer sa main en visière. Où était-elle ? Fut sa première pensée. Elle fouilla ses souvenirs et se redressa d'un bond en se remémorant son duel contre Kizaru. Aussitôt, la souffrance occasionnée par sa blessure au niveau du ventre se rappela à elle et lui arracha une grimace. Intriguée, elle abaissa les yeux, pour découvrir avec stupéfaction qu'elle ne portait plus que ses sous-vêtements. Néanmoins, des soins lui avaient été administrés comme en témoignait le bandage qu'elle effleura du bout des doigts.
« Maudit Kizaru ! » grommela-t-elle entre ses dents serrées. Il ne perdait rien pour attendre, se promit-elle avant de considérer la salle dans son ensemble.
Il s'agissait d'une vaste pièce aux murs de métal. De grandes armoires meublaient cette dernière. Toutes renfermaient divers instruments et médicaments, utiles à tout médecin. À cette pensée, le visage de Chopper s'imposa à elle et un sourire attendri étira ses lèvres fines. Mais, elle savait pertinemment qu'elle ne se trouvait pas à bord du Sunny. Non, cette pièce manquait de chaleur... Elle était froide et austère... À l'image qu'elle se faisait de cet endroit, le faciès d'un autre pirate se dessina dans l'écran noir de son subconscient. Celui de Trafalgar Law.
Avec un léger soupir, elle s'assit sur le bord du lit, prête à en descendre. Elle ne savait pas exactement où elle se trouvait, même si au fond d'elle, une petite voix lui soufflait que son bienfaiteur portait le surnom de « Chirurgien de la mort ».
À cette pensée, elle se figea. Le chirurgien de la mort ?! Si ce dernier l'avait emmenée sur son navire, elle n'était pas sortie de l'auberge ! Après tout, nul n'ignorait que son bateau n'était autre qu'un sous-marin. Priant le ciel pour se tromper, elle descendit du lit médical. Elle éprouva la froideur du métal sous la plante de ses pieds et chercha quelque chose à se mettre sur le dos. Elle ne pouvait pas se promener à moitié nue devant l'équipage des Hearts tout de même.
Et comme un fait exprès, la porte choisit ce moment pour s'ouvrir en face d'elle. Lentement, tel un automate, elle avisa de son visiteur. Tendue comme un arc, elle peinait à respirer jusqu'à ce que son cerveau lui envoie l'information cruciale qu'il ne s'agissait point de l'homme qu'elle pensait voir.
La main sur la poignée et vêtu d'une blouse blanche, un individu se dressait dans l'encadrement. Âgé d'une vingtaine d'années, il avait les cheveux blonds et les yeux verts. Sa surprise égalait sans nul doute celle de la jeune femme. Cependant, le premier moment de stupéfaction passé, l'inconnu la dévisagea quelques instants puis referma le battant dans son dos. D'une démarche assurée, il progressa dans sa direction.
L'invitée du chirurgien recula à chaque pas du nouveau venu. Tant et si bien qu'elle se retrouva très vite coincée entre le lit et l'étranger. Amusé, le blond posa ses mains de part et d'autre du corps de la patiente. Cette promiscuité soudaine lui permit de la scruter avec attention. Ce ne fut qu'à cet instant que la brune se rappela sa quasi-nudité. Cette unique pensée colora d'un rouge attendrissant ses joues délicates.
"Tu sembles aller bien. Ton pouls est un peu rapide, mais je mets ça sur le compte de ta nervosité face à ma proximité, ainsi que ta tenue des plus indécentes."
Hein quoi ? La brune papillonna des cils avant de remarquer que le blond s'écartait et s'éloignait, indifférent. Pourtant, le soulagement fut de courte durée lorsqu'elle le vit se défaire de sa blouse. Il n'envisageait tout de même pas à s'offrir un peu de bon de temps ? Cette pensée la révolta tandis que la promesse de le remettre à sa place naissait en elle.
Face à l'expression de l'invitée de son supérieur, l'inconnu se fendit d'un large sourire avant de lui tendre sa tenue de travail. Nul doute qu'elle se méprenait sur ses intentions. Mais, pouvait-il l'en blâmer ? De son côté, la jeune femme se révéla méfiante. Ses prunelles émeraude naviguèrent plus d'une fois du vêtement au visage de l'homme. Ce ne fut que lorsqu'il allongea un peu plus le bras qu'elle réagit et se saisit de la maigre protection qu'il lui offrait.
"Je m'appelle Owen. Je suis l'assistant à l'infirmerie, annonça-t-il en la regardant enfiler sa blouse, notant mentalement sa souffrance évidente à chaque mouvement.
Owen s'était présenté et espérait qu'elle l'imite. Mais, il se leurrait totalement. Elle ne desserra pas les dents, se contentant d'observer son environnement actuel, tel un animal apeuré. Mais de quoi avait-elle peur au juste exactement ?
Refusant de la brusquer, conscient qu'une fois le capitaine aux commandes, les choses seraient bien plus ardues pour elle, Owen lui expliqua ce qu'il envisageait de faire. Dans un premier temps, il l'examinerait de manière succincte, l'essentiel ayant déjà été fait. Il aspirait uniquement à s'assurer que son état lui permettait de se lever, même si elle avait fait fi d'éventuelles consignes médicales.
- Tu as perdu pas mal de sang. Heureusement, on avait encore des stocks de ton groupe sanguin. Tiens, assieds-toi.
D'un signe de la main, il lui désigna un tabouret. Immobile, elle fixait le siège; ce qui amena un sourire amusé sur le visage d'Owen. Il n'avait pas l'habitude que les gens se méfient autant de lui. Il ouvrait la bouche, prêt à reprendre la parole afin de tenter de la convaincre lorsqu'elle obtempéra docilement.
Bien. C'était un bon début, songea Owen tout en lui saisissant le bras auquel il glissa le tensiomètre. Elle se portait comme un charme en conclut-il avant de pointer le doigt vers son épaule, puis de descendre sur son ventre.
- Le capitaine a fait de l'excellent travail et il déteste devoir le réitérer. Alors, même si pour l'épaule, le danger est écarté, pour ton abdomen, je te déconseille tout mouvement brusque.
Elle opina du chef. Elle n'avait après tout aucune raison de se rebeller contre les consignes d'un médecin. Tout ce qu'elle voulait, c'était retrouver son équipage au plus vite. Et elle ne manqua pas de formuler sa requête de vive voix :
- Il n'y a donc aucun motif valable pour que je m'attarde ici ? J'aimerais rejoindre mes compagnons.
Ce fut à ce moment précis qu'elle crut que le ciel lui tombait sur la tête. Quelque peu embarrassé, Owen lui révéla que suite à l'arrivée de Kizaru à Shabaody, ils avaient fui l'île. Ils naviguaient actuellement sous la surface et à plusieurs encablures de cette dernière.
Non ! C'était n'importe quoi ! Comment allait-elle pouvoir rejoindre Luffy et les autres ? Elle devait impérativement y retourner. La date de leurs retrouvailles... Figée, elle dévisagea Owen cherchant une réponse à ses craintes. Mais combien de temps avait-elle dormi au juste ? Peut-être même qu'elle avait loupé le jour J!
- Combien de temps suis-je restée inconsciente ?", osa-t-elle demander.
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