Chapitre 1 : Course contre la lumière

Des explosions assourdissantes retentissaient de part et d'autre. Les gens fuyaient, terrorisés. La crainte de périr sous la pluie de balles grandissait en chacun. Nul ne souhaitait passer de vie à trépas en ces lieux et par la faute de stupides criminels. Quelle idée aussi de frapper un dragon céleste ! grogna intérieurement une jeune femme aux longs cheveux d'ébène noués en une queue-de-cheval. Un tel acte engendrait fatalement de lourdes conséquences.

Vêtue d'un pantalon noir et de bottines assorties ainsi que d'un débardeur bleu marine, elle se ruait vers l'inconnu. Effectivement, elle prenait la poudre d'escampette, mais ignorait encore sa destination. Ses chaussures martelaient frénétiquement l'herbe humide de l'île aux bulles. Une seule chose demeurait en son esprit : suivre la consigne de son capitaine. « Fuir et ne pas se laisser capturer ! » Oui, il valait mieux où son aventure s'achèverait ici.

Son cœur cognait dans sa cage thoracique, ses tempes bourdonnaient. Combien de temps devrait-elle encore courir ainsi ? Elle jurerait que toute sa vie, elle la consacrait à cela. Mais hors de question de baisser les bras ! Sa combativité et sa détermination l'empêchaient de renoncer aux rêves qu'elle nourrissait secrètement depuis sa venue au monde. Et bien plus depuis Luffy au chapeau de paille. Excédé par l'existence qu'elle menait, ce dernier avait brisé les chaînes l'entravant. Et le goût exquis de cette liberté fraîchement acquise, elle ne le laisserait pas s'estomper ! Elle avancerait coûte que coûte ! Mais pour l'heure, échapper à ses poursuivants revêtait d'une importance capitale. Cette pensée se frayant un chemin dans sa petite tête bien remplie, elle jeta un bref coup d'œil par-dessus son épaule. Le soulagement la gagna. Personne ne la suivait ou alors elle les avait tout bonnement distancés.

Inconsciemment, elle ralentit son allure lorsqu'une effroyable explosion retentit à proximité. Surprise, elle se figea et porta ses magnifiques yeux émeraude vers sa provenance. Elle nota le nuage dense et sombre s'élevant dans le ciel, l'obscurcissant. Elle tiqua. La crainte que l'un de ses précieux nakamas soit aux prises avec l'ennemi l'inquiéta. Après tout, leur fuite s'avérait brouillonne et ils ignoraient chacun la position des autres.

Déterminée à ne pas perdre une seule seconde, elle se précipita vers le lieu de l'affrontement. Après quelques minutes, elle parvint à destination. Immobile, sur la butte de terre, elle surplombait la scène en contrebas. Le soulagement l'assaillit. Il ne s'agissait guère de ses compagnons, mais d'un équipage rival qu'elle identifia sans peine. Comment ne pas le reconnaître, après tout ? Trafalgar Law ! Des criminels comme lui, il n'en existait pas deux. Affublé d'un bonnet de fourrure blanc moucheté de noir, il se démarquait des pirates actuels par son sabre et ses tatouages. De plus, les avis de recherche le concernant faisaient légions tout autant que ceux des autres supernovas. Impossible, par conséquent, de ne pas parvenir à l'identifier.

D'un bref coup d'œil, elle évalua la gravité de la situation. Le chirurgien de la mort et ses hommes bataillaient contre l'amiral Kizaru. Ils ne pouvaient pas tomber plus mal, songea la jeune femme. Cet homme possédait un pouvoir des plus problématiques : la lumière.

Elle demeura immobile durant plusieurs minutes à les observer. Trafalgar ne déméritait point. Il manquait certes de force, cependant sa capacité parvenait encore à lui sauver la mise. Quoique, pas toujours, se corrigea-t-elle, en le voyant encaisser un fulgurant coup de pied.

En temps ordinaire, elle ne se mêlerait point d'un duel qui ne la concernait guère. Hélas, sa bonne conscience lui dictait de prêter assistance à ceux ayant aidé son équipage un peu plus tôt. D'un claquement de la langue sur le palais, elle hésitait encore à intervenir malgré tout. Après tout, se confronter à Kizaru maintenant se révélerait préjudiciable. D'un autre côté, elle doutait que son sens moral l'accepte aussi aisément. Sa culpabilité la rongerait à petit feu.

En contrebas, Trafalgar peinait à résister aux assauts répétés de son adversaire. Bien qu'usant de son pouvoir afin de se téléporter et esquiver les coups, son temps de réactivité laissait à désirer. Mais qui pouvait se targuer de rivaliser avec cet élément ?

Le souffle court, Trafalgar se redressa une énième fois. Il refusait de renoncer maintenant, de s'avouer vaincu. Il se débarrasserait de son opposant coûte que coûte. Cette pensée raviva sa détermination. Un sourire sadique dont lui seul détenait le secret retroussa le coin de ses lèvres. Il manquait de puissance de frappe, mais il ne comptait pas sur cela pour gagner. Non, plus que la force brute, la ruse lui réussissait mieux.

En un éclair, Kizaru se volatilisa sous les yeux de tous pour réapparaître sous le nez du chirurgien de la mort. Il lui décocha un coup de pied luminescent que Law esquiva de justesse. Aucune de ses offensives ne parvenait à l'atteindre et il se contentait de parer les assauts. Les amiraux étaient d'un tout autre calibre. En cet instant, il maudissait le chapeau de paille dont l'impulsivité leur causait bien des ennuis.

Borsalino enchaînait les attaques lorsque son pied rencontra « enfin » sa cible. Le brun fut projeté à terre et roula sur plusieurs mètres. Dans sa chute, il lâcha son précieux nodachi. Sur le dos, il souleva péniblement les paupières. Un filet de sang coulait de son arcade sourcilière teintant de rouge sa vision. Il balaya les lieux d'un coup d'œil circulaire en quête de son ennemi. Il le repéra à quelques pas de là. Placidement, comme si de rien n'était, Borsalino levait la main dans sa direction. Pâle, le corps meurtri, il le regarda pointer l'index sur sa personne. Une expression affable comme toujours collée au visage, Kizaru décocha un tir de son effroyable pouvoir. Mais il était bien trop tard pour l'esquiver... Il n'en possédait plus la force surtout. Nul n'était capable de résister à la vitesse de la lumière. « Il allait morfler et se le prendre de plein fouet », fut son ultime pensée.


"Capitaine !", Hurlèrent ses nakamas sous l'effet de la panique.


Pourtant, rien ne se produisit. Ou plutôt si. Contre toute attente, les projectiles furent repoussés. Renvoyé à l'expéditeur, ce dernier se déplaça imperceptiblement afin de les éviter. Abasourdi, Kizaru papillonna des yeux avant de se fendre d'un sourire ravi. Elle ? C'était bien la dernière personne qu'il pensait croiser ici. Oh, les informations en sa possession la situaient sur cette île, mais il l'imaginait plutôt fuir leur rencontre que de l'affronter de front. Mais, cela ne lui déplaisait pas. Bien au contraire, il jubilait. S'il parvenait à la capturer et à la ramener à Marineford, la récompense et les louanges lui reviendraient.

Yeux plissés, Trafalgar étudia le dos de son sauveur avant de réaliser qu'il s'agissait d'une femme. À quel point était-elle folle ? Tout le monde préférerait fuir plutôt que d'affronter ce monstre. De plus, qui prêtait assistance à des étrangers et potentiellement ennemis ? Nul doute que ça ne tournait pas rond dans sa tête.


– Barrez-vous, pendant que je l'occupe.

– Me donne pas d'ordres ! grommela Trafalgar en se redressant.

– Tu crois que c'est le moment, crétin ?


Crétin ?! Sérieusement ? Pour qui se prenait cette nana ? Et puis, fuir et abandonner une femme derrière lui, hors de question ! Il avait tout de même sa fierté !


– T'avais qu'à pas t'immiscer dans mes affaires.

– Ah ouais ? Ben, t'es con ou quoi ? Si je n'étais pas intervenue, tu serais mort ! Kapout ! Tu piges ?

– Insulte-moi encore et c'est toi que je bute en premier.

– Essaye pour v..."


Elle n'eut point le loisir d'achever sa répartie que Kizaru décocha une nouvelle salve. De sa lame, elle les bloqua. Toutes. Enfin, non pas tout à fait puisque l'un des projectiles l'atteignit à l'épaule. La douleur vrilla son être, sa chair tandis qu'elle se mordait la lèvre inférieure pour ne pas hurler. Elle manqua de peu de lâcher son arme. Fort heureusement, sa volonté et sa détermination lui permirent de résister.

Kizaru s'amusait de la situation. Ces deux-là ne s'entendaient pas du tout. Ils s'octroyaient même le loisir de se bouffer le nez devant lui sans se préoccuper du danger. Détail qui confirmait cependant les données en sa possession. Ils ne se connaissaient pas. Mais alors que faisaient-ils donc ensemble ?

Trafalgar ramassa son nodachi, déterminé à ne pas perdre la face. Et tandis qu'il refermait ses dactyles sur la garde de son sabre, l'inconnue se ruait déjà sur leur adversaire. Quelle idiote ! songea-t-il en voyant l'officier de la marine lever de nouveau, avec une nonchalance caractérisée, un doigt sur elle avant de décocher une rafale de plusieurs petits projectiles. Nombreux, rapides, et suivant tous la même trajectoire, ils fondaient droits sur leur cible.

Vive, sans s'arrêter, l'étrangère bloqua les billes lumineuses de sa lame. Profitant du fait que son attention soit focalisée sur cette tâche, Kizaru se changea en lumière et disparut du champ de vision du commun des mortels pour se matérialiser dans le dos de la brune. Sans une once d'hésitation, l'homme au costume rayé tendit la main vers sa proie. Ses doigts, telles des serres acérées s'approchèrent dangereusement du cou de la jeune femme, effleurèrent ses cheveux lorsque tout à coup elle se volatilisa à son tour.

Surpris, Kizaru pencha la tête sur la droite avant de jeter un vif coup d'œil vers le chirurgien de la mort. Ce dernier avait fait usage de son pouvoir pour sauver sa cible. Sans un mot, il abaissa le bras et pivota vers le duo.

Ils ne s'entendaient pas, mais parvenaient néanmoins à coopérer, nota-t-il intérieurement. À ce rythme, Trafalgar risquait fort de lui compliquer quelque peu la tâche.

De son côté, la demoiselle se positionna aux côtés de Trafalgar. Elle ne le regarda pas une seule fois, mais sentait son attention pesée sur elle. De toute évidence, il cherchait à deviner sans nul doute sa prochaine action.


"Il ne peut pas nous suivre tous les deux, fit-elle. Je vais à droite et tu prends la gauche."


Et avant même qu'il puisse protester, la brune s'élança. Dans sa course, elle contourna son adversaire tout en espérant que la cervelle de Trafalgar fonctionnerait comme elle le prévoyait. Du coin de l'œil, elle observait les mouvements de Kizaru. En cas d'attaque sur sa personne, elle devrait riposter. La douleur à l'épaule risquait d'amoindrir la virulence du coup, mais elle ne reculerait pas.

Sans tergiverser plus longtemps, d'un claquement de la langue, Law s'élança à son tour. Épuisé, ses membres inférieurs se mouvaient à la seule force de sa détermination. Cependant, hors de questions de fuir la queue entre les jambes et laisser cette femme le combattre seule. Sans faillir, il opta, à contrecœur, pour l'autre côté. Il se déplaçait avec rapidité. Sans attendre, et prévoyant, il invoqua sa room. À sa grande surprise, le vice-amiral ne bougeait pas et se contentait de les regarder à tour de rôle. Pourtant, il doutait qu'il demeure ainsi immobile à patienter qu'ils l'attaquent. Non, une idée devait assurément se former dans son esprit. Oui, mais laquelle ?

Subitement, la brune bondit sur le marine et brandit sa lame. Derrière Kizaru, Law l'imita. Or, avec une aisance effarante, Kizaru bloqua les deux sabres à mains nues. Sans attendre et nullement impressionnée, la jeune femme tenta un coup de pied au visage de son ennemi, tandis que Trafalgar essayait de lui envoyer une décharge électrique sur le thorax.

Mais aucun des deux assaillants ne parvint à atteindre son adversaire. En effet, Borsalino joua les toupies et tournoya sur lui-même avant de les expédier tous deux dans le décor. Sauf que contrairement à ce qu'il présageait, aucun des deux ne se fracassa sur le sol. Trafalgar usa de son pouvoir et les téléporta, une fois de plus, au plus près de Kizaru qui, surpris cette fois, peina à bloquer l'assaut. Trafalgar lui décocha une décharge électrique effroyable suivie d'emblée d'un coup de pied des plus brutal. L'officier de la marine vola sur plusieurs mètres avant de s'écraser dans l'herbe. Une plainte sourde lui échappa. Et tandis que la poussière s'élevait depuis le lieu d'impact, Trafalgar rejoignit la brune.

À peine retourna-t-il aux côtés de cette dernière qu'elle s'écroula, allant embrasser le pull jaune canari. Son sabre tomba à terre, brisé. Et sans doute aurait-elle accompagné la course de son katana si le chirurgien de la mort ne l'avait pas retenue d'un bras autour de la taille. Dans un froncement de sourcils, le pirate tenta de comprendre ce qu'il venait de se produire, mais aussi, et surtout où était passé l'autre morceau de métal. Le liquide chaud mouillant son pull lui rappela qu'elle était blessée. Ce ne fut qu'à cet instant qu'il remarqua le bout manquant figé dans son abdomen. Sans tergiverser, il le retira et le jeta au sol.


"Pfiou... ça, c'était un coup de pied...", marmonna Kizaru pour lui-même.


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